Compte - Louis-Damien Lacroix de Beaufoy

[Louis-Damien Lacroix de Beaufoy]

Il n'était pas facile de venir discrètement à la Banque de Frôce, lorsque l'on était Président de la République. Lacroix était arrivé par l'entrée du personnel, de façon surprise. Il souhaitait parler au Gouverneur, à titre purement personnel. Il se présenta à l'accueil et attendit qu'on le reçoive.

[Jean Kess]

Jean avait été très occupé les deux dernières semaines, entre la Banque et l'INSEEF, il n'avait même plus le temps de voir Jean-Philippe, leur couple traversait une mauvaise passe ces derniers temps, il s'apprêtait à l'appeler quand sa secrétaire vint le prévenir que le président souhait le voir.
Le président en personne ? sa première pensée a été qu'à force de vouloir tout finir rapidement, il avait du commettre des erreurs, mais il n'y avait qu'un moyen de le savoir, il l'accueillit donc chaleureusement dans son bureau, se demandant bien de quoi il voulait lui parler.

Monsieur le Président, c'est un honneur de vous recevoir.
Mais je vous en prie, prenez place, souhaitez-vous un rafraichissement ?

[Louis-Damien Lacroix de Beaufoy]

Louis-Damien pénétra ( ) dans le bureau de Jean Kess et serra la main à ce dernier. Il s'installa devant son bureau et répondit :

- Enchanté, également. Non je vous remercie, pas de rafraîchissement. Excusez-moi je viens comme ça sans rendez-vous mais les journalistes sont ce qu'ils sont, toujours à l'affût de mes déplacements. Et vous conviendrez que pour se rendre à sa banque, on préfère conserver un minimum d'intimité.

Il avait un porte-documents avec lui et il sortit quelques feuilles, avec un stylo :

- Cela fait un petit temps que vous travaillez là et nous nous connaissons plus ou moins. Aujourd'hui je suis ici à titre personnel, non en tant que Président de la République. Il se trouve en effet que j'ai de l'argent bien placé et que je suis intéressé par l'achat d'un bien immobilier, à Nobles, dans le Massif des Prigors. Avant toute chose, j'aimerais que nous ayons une conversation totalement privée et un peu plus rapprochée...

Louis-Damien n'avait jamais personnellement remarqué que Jean était gay. Il avait eu tellement de choses à faire au gala qu'il n'avait pas remarqué la passion animant Jean-Philippe Herbien et le Gouverneur de la Banque de Frôce. Sa phrase était totalement innocente, mais elle pouvait également être interprêtée de façon plus cocasse. Déjà Lacroix s'était-il rapproché un peu plus de Kess.

[Jean Kess]

Une conversation rapprochée ? Et lui aussi se rapprocher ? il ignorait si c'est dû à l'actuelle femme que fréquentait le président, puisqu'il devait surement en fréquenter une, mais elle ne doit pas le combler pour qu'il change son fusil d'épaule.
A ce moment, Jean ne pensait plus à ce qu’il avait pu faire comme erreur, mais à ce que voulait de lui le président, puisque selon toute vraisemblance il ne semblait pas être là pour parler au gouverneur mais à jean en personne.
Dans le doute s'abstenir, il se contenta de répondre simplement sans laisser paraître son air surpris

Hum...et bien, je vous écoute monsieur le président...

[Louis-Damien Lacroix de Beaufoy]

- Parfait...

Il s'approcha davantage, s'assura que portes et fenêtres étaient fermées puis dit à voix basse :

- Je ressens énormément de sentiments pour une personne en particulier... je veux lui faire plaisir et l'inviter à partager une vie commune, à deux, dans un endroit calme et posé. Tout ça parce que je ne ne supporte pas le fait que cette personne soit loin de moi et que nous n'ayons pas de nid douillet. Seulement, je ne sais pas si elle accepterait de venir avec moi et de me suivre. Je me suis dit que je devais lui faire la surprise et donc me voilà aujourd'hui dans votre bureau.

Louis-Damien était nerveux. C'était la première fois qu'il faisait ce genre de confidences. Il n'avait pas fait attention à ces propos en fait, il était totalement occupé par d'autres pensées.

[Jean Kess]

Jean commençait vraiment à ne plus savoir de quoi le président lui parlait et il était de plus en plus proche. Serait-ce lui cette personnes ? mais il ne s’étaient parlés que quelques fois avant cela et le président ne lui parut pas vraiment être du genre à aimer les hommes, il avait quand même le don de les repérer.
Voyant que le Président se confiait à cœur ouvert à lui, il se rapprocha aussi de son coté, lui était amoureux de Jean-Philippe, même si en ce moment leur relation battait de l’aile.

Monsieur le président, vous avez le droit de rêver à une vie à deux avec la personne que vous aimez, et vouloir lui faire une surprise comme celle dont vous venez de me parler est très romantique.
Mais…euh…vous…hum...avez-vous d’abord demandé si cette personne était libre ? je veux dire, je ne voudrai pas que vous soyez blessé, et…je…vous savez qu’en tant que président vous devez faire attention à votre image…

Jean commençait à ne plus savoir quoi répondre, les mots du président étant un peu trop vagues pour le moment.

[Louis-Damien Lacroix de Beaufoy]

Louis-Damien entendait bien ce que lui disait le Gouverneur et d'un élan passionné, il le prit par les épaules, le secoua un peu et dit, le visage réjoui et la voix emportée par ses sentiments :

- Vous ne comprenez pas... c'est là au fond de moi, depuis tellement longtemps ! Je n'aurais jamais cru que ça m'arriverait un jour de le dire si ouvertement ! Je me fous de mon image, vous comprenez ? J'aime cette personne... je suis fou d'elle et je ne peux plus le cacher. J'ai envie de l'assumer et de le vivre pleinement, à découvert ! Et me débarasser de ce secret finalement misérable. Après tout c'est mon choix de vie ! Quant à la question du célibat, elle m'importe si peu... mais elle serait en même temps désastreuse c'est vrai... mon coeur en serait ruiné, éperdu, esseulé... tant et si bien que je réfléchirais au but de ma vie... pour savoir si elle vaut vraiment le coup sans ma moitié... Vous comprenez ce que je veux vous dire ? Je ne peux trouver d'autres mots, il y en a tellement que je suis perdu dans toute la foule de sentiments que je ressens.

[Jean Kess]

Jean resta silencieux sans dire un mot, le Président semblait totalement fou de cette personne, de lui ? si au moins il finissait par avouer qui est cette personne, qu’il puisse répondre clairement, mais en attendant il valait mieux rester vague aussi.

Je vous entends, et je vous comprends monsieur le président, mais excusez-moi de vous dire cela, il serait idiot de penser à vouloir mettre fin à votre vie dans le cas ou vos projets ne puissent aboutir, vous savez, je suis certain que quoi qu’il arrive, vous trouverez une personne qui saura vous aimer comme vous l’aimez, une personne qui partagera les mêmes sentiments que vous, et qui sera heureuse de vivre le restant de ses jours avec vous dans la maison que vous aurez choisi...

[Louis-Damien Lacroix de Beaufoy]

- Mais je ne peux pas aimer une autre personne... je le sais. Je ne peux pas l'oublier. Mettez-vous à ma place, qu'est-ce que vous feriez ? Vous ne tenteriez pas tout pour l'avoir près de vous ? C'est là, au fond de moi et je l'aime. J'ai besoin d'une réponse, mais j'ai si peur de l'obtenir, que ça soit un refus. Que repondriez-vous, vous ? Qu'est-ce que vous diriez dans la supposition où vous êtes cette personne ?

Il ne l'avait pris que pour exemple, sans y voir une quelconque allusion douteuse. Mais la situation devenait axée autour d'un énorme malentendu...

[Jean Kess]

Dans quelle situation se retrouvait-il ? En plus si la réponse ne lui plaisait il pas il risquait de le virer…
A dire vrai il était complètement perdu avec tout ce que disait le président, et la question qu'il lui pose le mettait très mal à l'aise.
Il ne pouvait pas y répondre pour l'instant sachant qu'il parlait peut-être de lui, mais il devait en être sûr.

Et bien, vous savez Monsieur le Président, je ne sais quoi vous répondre…
Vous devriez lui poser la question clairement, ainsi vous aurez une réponse claire, même si je ne peux vous assurer qu'elle sera celle que vous attendez.