L'émission débute avec Raphaël Belgard seul.
Il y a quelques jours, j'avais enregistré depuis son domicile une interview pour votre émission avec Hugo Salinovitch. Alors que cette émission est traditionnellement en direct, j'avais accepté le principe du fait que monsieur Salinovitch m'avait expliqué être très fatigué. Cette émission a été enregistré quelques heures avant sa mort.
Il y a quelques jours, j'avais enregistré depuis son domicile une interview pour votre émission avec Hugo Salinovitch. Alors que cette émission est traditionnellement en direct, j'avais accepté le principe du fait que monsieur Salinovitch m'avait expliqué être très fatigué. Cette émission a été enregistré quelques heures avant sa mort.
En tant d'années de luttes politiques, on ne m'a rien épargné (...) Mais, je vous le répète, ceci n'est pas important. L'important se sont mes combats pour la justice sociale, pour une école de qualité, pour une méritocratie républicaine.
Monsieur Salinovitch, tout d'abord merci d'avoir accepté cette interview. Vous connaissez le principe, une bouteille d'eau et un verre sont à votre disposition.
Je vous remercie monsieur Belgard.
Commençons....Vous annonciez il y a peu votre retrait de la vie politique et vous voici ici acceptant une interview, n'est-ce pas contradictoire ?
Pourquoi, selon vous, seuls les élus ont le droit à la parole ? Quelle drôle de conception de la démocratie ! Si vous voulez, je peux partir et vous laisser poser les questions à ma chaise !
Mais non, mais non, mais vous comprenez bien ce que je veux dire monsieur Salinovitch...
Écoutez, arrêter d'être élu ne veut pas dire être muet, je le serai à ma mort pas avant.
Monsieur Salinovitch, pourquoi avoir arrêté la politique suite à votre défaite, ça fait un peu soupe au lait tout çà...
Monsieur Belgard, j'ai une longue carrière derrière moi. J'ai été secrétaire d’État, ministre, premier ministre, élu député sans discontinuité depuis des années, maire d'Orgues-les-Bains depuis mes débuts en politique. Aussi, ne pensez-vous pas que j'ai longuement réfléchi avant de prendre ma décision ?
Je me suis présenté aux élections présidentielles, ma décision était déjà prise en cas d'échec. J'ai rassemblé des suffrages sur mon nom, et je n'en rougis pas. 18% des électeurs sur mon seul nom, alors que je n'étais ni président sortant, ni ministre sortant, cela n'est pas mal. Mais cela n'était pas suffisant. Aussi, au vu de mon âge, je me suis dis qu'il était temps de raccrocher.
Vous avez sérieusement décroché ou vous êtes comme certains à jurer un arrêt et à revenir ?
Vous savez, j'ai plusieurs défauts mais je fais toujours ce que je dis. Je ne serai plus candidat à aucune élection ou même à aucune fonction dans mon parti, vous voyez.
Votre parti …...Vous parlez du NPS. D'ailleurs, on vous a peu entendu sur cette fusion....
Hé bien, j'avais d'autres chats à fouetter. Que voulez-vous que je dise. Cette fusion était devenue logique, et je l'ai soutenu, même si les relations avec certains seront difficiles je pense.
Des noms monsieur Salinovitch, des noms...
Alors là, vous pouvez rêver, je n'en citerai pas ! Mais bien sûr qu'avec certains, cela ne sera pas aisé de suite, mais vous savez, l'avenir de la Frôce passe avant nos bisbilles, du moins cela est ma logique. Je tendrai toujours ma main à mes camarades, comme toujours.
Ok, ça sera langue de bois ce soir ?
Vous me connaissez donc si mal que çà monsieur Belgard ? Mais dégommer gratos, non merci !
Bon, avançons. Voilà maintenant quelques temps que le gouvernement est aux manettes, quel est votre jugement ?
Mon jugement sera pour la fin, là ça serait plutôt une vision d'étape. Vous voyez, après tant de temps, je me demande où sont les mesures envers les plus faibles, les classes populaires, les classes moyennes. L'urgence a toujours été là pour moi et nulle part ailleurs. Alors on peut se faire plaisir avec des mesurettes populistes, comme la limitation des salaires, ou faire des déclarations de principes qui ne mangent pas de pain, l'urgence n'est pas traitée. Mais je fais confiance à mes camarades du NPS et seulement à eux pour y répondre.
Donc pour vous ce gouvernement ne va pas dans le bon sens ?
Ne me faîtes pas dire ce que je n'ai pas dis. J'ai dis et je le confirme, qu'il n'y a pour le moment pas de mesures pour répondre aux urgences sociales . Donc wait and see comme on dit là-bas.
Le problème monsieur Salinovitch quand on vous écoute, c'est que c'est toujours la même chose : urgence sociale, classe populaire, classe moyenne. A quand un renouvellement du disque ?
Monsieur Belgard, lorsque l'on est assis sur un siège à la télévision, que l'on gagne bien sa vie, que l'on a un emploi où on ne se salit pas, que son emploi est quasiment garanti, il est aisé de parler comme vous. Oui, dans votre cas, Salinovitch il vous fatigue avec ses vieilles lunes socialistes. Mais sortez un peu de votre studio et venez voir la vraie Frôce, celle des travailleurs, des chômeurs, des employés, des retraités. Celle de ces gens qui ne savent pas de quoi demain sera fait. Celle de ces gens qui se lèvent tous les matins mais qui finissent tous les mois dans le rouge. Hé bien moi, je ne les abandonnerai jamais, vous entendez jamais. Après que cela fatigue monsieur Belgard, hé bien c'est le dernier de mes soucis.
Monsieur Salinovitch, vous nous parlez de ces classes, en me prenant à parti. Mais excusez-moi, êtes-vous vous même membre de ces classes ?
Ah non pas du tout et ceci depuis des années. Mais je vais devoir m'excuser d'avoir grimpé l'échelle sociale ? Si je l'ai grimpé, c'est parce que l’instruction m'a permis ceci, et moi je me bats pour que nous soyons de plus en plus nombreux dans ce cas. Lorsque je grimpais les marches, je voyais mes collègues rester en bas, alors qu'ils avaient les capacités, mais n'étaient pas bien nés, alors qu'en haut, nous les enfants du Peuple, nous n'étions que peu nombreux, les places étant pris par ceux qui s'étaient juste donné la peine de naître. Hé bien, voilà pourquoi je combats pour ces classes monsieur Belgard.
Je vais vous donner un exemple : lorsque je milite pour une hausse des impôts, que croyez-vous ? Que je n'en paie pas ? Je ferai partis de ceux qui en payeront plus. Hé oui, tous les politiques ne travaillent pas que pour leur compte en banque, cela vous en bouche un coin !
Non, non rassurez-vous monsieur Salinovitch. D'ailleurs, en parlant de vos idéaux, voilà des années qu'on ne vous a pas vu au gouvernement, pourquoi cette absence ?
Lorsque j'ai quitté Belley, mon gouvernement n'avait pu mener tous mes projets, puisque certains de mes alliés m'avaient savonné la planche. J'ai compris que je dérangeais, que je ne réussirai pas sauf si mon parti devenait seul majoritaire, voilà la seule condition qui m'aurait conduit à rejoindre un gouvernement.
Donc un constat d'échec monsieur Salinovitch ?
Mais encore heureux. Je n'ai pas encore un goitre d'autosatisfaction qui pend. J'ai une vision pour la Frôce et tant qu'elle ne sera pas atteinte, je serai insatisfait. Et je le serai à vie, car je ne me satisferai jamais de la situation des plus faibles, même si il n'y a pas que des échecs.
Les ouvriers, employés frôceux vivent mieux aujourd'hui en Frôce qu'il y a des années, et sans me mettre en avant, je suis fier d'avoir participé à ceci.
Monsieur Salinovitch, vous parliez d'alliés qui vous avez savonné la planche, de qui parlez-vous ?
Décidément c'est une lubie chez vous, il vous faut des noms. Le passé et le passé, et du passé faisons table rase !
Parlez-nous de monsieur McGregor....
Que voulez-vous donc que je vous dise ?
Hé bien, revenez sur vos relations !
Tout a déjà été dit. Nous ne sommes pas les meilleurs amis du monde, ça c'est pas un scoop. Mais j'ai du respect politique pour cet homme malgré toutes nos divergences. Heureux ?
Je n'ai pas à l'être, mais bon, monsieur Salinovitch, quand on vous voit au NPS avec les ex-PSD que vous avez combattu, vous comprenez que l'on puisse rester dubitatif ?
Bien sûr, mais j'ai un scoop pour vous monsieur Belgard. J'ai arrêté la vie politique. Aussi, nos combats passés sont du passé. Les batailles à venir sont bien plus importantes, et il faut une nouvelle génération pour les mener.
Quand vous nous parlez d'une nouvelle génération, que pensez-vous d'ailleurs de l'arrière garde qui s'accroche toujours au pouvoir ?
Chacun fait ce qu'il veut. Pour ma part, j'ai toujours défendu le fait qu'il fallait savoir se retirer pour laisser la nouvelle génération monter, celle-ci étant la plus en phase avec les évolutions de notre société, pas comme celle qui est plus proche de la tombe que du berceau. Et je me suis appliqué cet adage.
Bon puisque vous parlez de votre génération, que pense l'ancien combattant pour la démocratie de l'évolution de notre système politique ?
Si vous voulez évoquer le référendum à venir, je n'annoncerai pas de choix public m'étant retiré de la vie politique. Maintenant, ce n'est pas une surprise de dire que je voterai personnellement non étant attaché au système parlementaire. Mais vous savez, ce qui m'inquiète est l'évolution qu'on a connu : une abstention de plus en plus importante, une extrème-droite implantée qui aujourd'hui est seulement absente car son leader est décédé. Il faut que la nouvelle génération prenne ces problèmes par les cornes, sinon c'est toute notre démocratie qui pourrait en pâtir par une crise de la représentativité.
Il faudrait aussi sûrement éduquer les jeunes générations, leur rappeler par où est passé notre pays, il n'y a pas si longtemps. Nos jeunes ne sont pas conscients de ceci, mais comment pourraient-ils l'être, ceci est peu étudié à l'école, nos élites politiques n'évoquent jamais notre passé récent. J'ai été un des rares à le faire, mais d'un coté ma canne me le rappelle quotidiennement.
Vous voyez, l'attachement à la démocratie doit passer avant tout, nous ne pouvons retomber dans les affres du passé. Et celles et ceux qui sont persuadés que cela est impossible que nous retombions dans ces travers se trompent. La Russie en est le meilleur exemple. Après voir connu une légère ouverture sous Eltsine, même si elle n'était pas parfaite, est retombée dans le despotisme avec Poutine. Que cet exemple serve à la méditation de nos dirigeants, la bête immonde peut toujours revenir.
Monsieur Salinovitch, certains vous ont accusé dans le passé de mettre en avant votre histoire personnelle, dans la résistance, à des fins politiques, vous n'avez jamais répondu à ces attaques pourquoi ?
Écoutez, en tant d'années de luttes politiques, on ne m'a rien épargné. On a parfois été à la limite de la caricature du rouge avec le couteau entre les dents. Toutes les insultes ont été permises, les vexations. Je n'ai jamais répondu, car moi mon objectif n'est pas ceci. On m'a exclu de l'Assemblée Nationale, on m'a lâché en pleine mandature, et j'en passe. Mais, je vous le répète, ceci n'est pas important. L'important se sont mes combats pour la justice sociale, pour une école de qualité, pour une méritocratie républicaine.
Donc oui, je n'ai pas répondu non plus à ces attaques, même si en toute transparence, elles ont été celles qui m'ont le plus blessé. Je n'ai jamais évoqué ce passé à des fins politiques, autre que rappeler les dangers de la dictature, ce qu'elle a été. J'ai vu des camarades mourir, j'ai subi ce que j'ai subi, et utiliser ceci contre moi, oui cela m'a blessé. Mais de l'époque de la dictature, j'ai appris à souffrir en silence, tout simplement.
Monsieur Salinovitch, et cela sera ma dernière question, qu'est-ce qu’un homme aussi fougueux va-t-il faire de sa retraite ? Craignez-vous que l’inaction soit synonyme de mort ?
Oh vous savez, à mon âge, on savoure. J'espère vivre encore un peu pour faire ce que je n'ai pu faire dans ma vie : voyager, profiter de mes amis, visiter tous les coins de notre pays. Et puis tout simplement attendre la rencontre avec mon destin, et l'affronter.
Vous savez, je n'ai pas peur de la mort. Cela peut paraître très prétentieux, mais après ce que j'ai vécu dans ma jeunesse, c'est un miracle que je sois encore là. Et comme beaucoup de survivants, j'ai un sentiment de culpabilité par rapport à mes camarades de lutte qui sont morts. J'irai donc les rejoindre dans l'au-delà si cela existe ou sous terre. Ça sera l'occasion de belles retrouvailles, et de repos, que j'ai mérité. Mon seul regret est que mes engagements m'ont toujours amené à délaisser ma vie privée et oui je regrette à mon âge de n'avoir pas eu d'enfants. Mais le destin sûrement, le destin monsieur Belgard.
Merci pour cette sincérité monsieur Salinovitch et merci d'avoir répondu à mes questions.
C'est moi qui vous remercie monsieur.
Je vous remercie monsieur Belgard.
Commençons....Vous annonciez il y a peu votre retrait de la vie politique et vous voici ici acceptant une interview, n'est-ce pas contradictoire ?
Pourquoi, selon vous, seuls les élus ont le droit à la parole ? Quelle drôle de conception de la démocratie ! Si vous voulez, je peux partir et vous laisser poser les questions à ma chaise !
Mais non, mais non, mais vous comprenez bien ce que je veux dire monsieur Salinovitch...
Écoutez, arrêter d'être élu ne veut pas dire être muet, je le serai à ma mort pas avant.
Monsieur Salinovitch, pourquoi avoir arrêté la politique suite à votre défaite, ça fait un peu soupe au lait tout çà...
Monsieur Belgard, j'ai une longue carrière derrière moi. J'ai été secrétaire d’État, ministre, premier ministre, élu député sans discontinuité depuis des années, maire d'Orgues-les-Bains depuis mes débuts en politique. Aussi, ne pensez-vous pas que j'ai longuement réfléchi avant de prendre ma décision ?
Je me suis présenté aux élections présidentielles, ma décision était déjà prise en cas d'échec. J'ai rassemblé des suffrages sur mon nom, et je n'en rougis pas. 18% des électeurs sur mon seul nom, alors que je n'étais ni président sortant, ni ministre sortant, cela n'est pas mal. Mais cela n'était pas suffisant. Aussi, au vu de mon âge, je me suis dis qu'il était temps de raccrocher.
Vous avez sérieusement décroché ou vous êtes comme certains à jurer un arrêt et à revenir ?
Vous savez, j'ai plusieurs défauts mais je fais toujours ce que je dis. Je ne serai plus candidat à aucune élection ou même à aucune fonction dans mon parti, vous voyez.
Votre parti …...Vous parlez du NPS. D'ailleurs, on vous a peu entendu sur cette fusion....
Hé bien, j'avais d'autres chats à fouetter. Que voulez-vous que je dise. Cette fusion était devenue logique, et je l'ai soutenu, même si les relations avec certains seront difficiles je pense.
Des noms monsieur Salinovitch, des noms...
Alors là, vous pouvez rêver, je n'en citerai pas ! Mais bien sûr qu'avec certains, cela ne sera pas aisé de suite, mais vous savez, l'avenir de la Frôce passe avant nos bisbilles, du moins cela est ma logique. Je tendrai toujours ma main à mes camarades, comme toujours.
Ok, ça sera langue de bois ce soir ?
Vous me connaissez donc si mal que çà monsieur Belgard ? Mais dégommer gratos, non merci !
Bon, avançons. Voilà maintenant quelques temps que le gouvernement est aux manettes, quel est votre jugement ?
Mon jugement sera pour la fin, là ça serait plutôt une vision d'étape. Vous voyez, après tant de temps, je me demande où sont les mesures envers les plus faibles, les classes populaires, les classes moyennes. L'urgence a toujours été là pour moi et nulle part ailleurs. Alors on peut se faire plaisir avec des mesurettes populistes, comme la limitation des salaires, ou faire des déclarations de principes qui ne mangent pas de pain, l'urgence n'est pas traitée. Mais je fais confiance à mes camarades du NPS et seulement à eux pour y répondre.
Donc pour vous ce gouvernement ne va pas dans le bon sens ?
Ne me faîtes pas dire ce que je n'ai pas dis. J'ai dis et je le confirme, qu'il n'y a pour le moment pas de mesures pour répondre aux urgences sociales . Donc wait and see comme on dit là-bas.
Le problème monsieur Salinovitch quand on vous écoute, c'est que c'est toujours la même chose : urgence sociale, classe populaire, classe moyenne. A quand un renouvellement du disque ?
Monsieur Belgard, lorsque l'on est assis sur un siège à la télévision, que l'on gagne bien sa vie, que l'on a un emploi où on ne se salit pas, que son emploi est quasiment garanti, il est aisé de parler comme vous. Oui, dans votre cas, Salinovitch il vous fatigue avec ses vieilles lunes socialistes. Mais sortez un peu de votre studio et venez voir la vraie Frôce, celle des travailleurs, des chômeurs, des employés, des retraités. Celle de ces gens qui ne savent pas de quoi demain sera fait. Celle de ces gens qui se lèvent tous les matins mais qui finissent tous les mois dans le rouge. Hé bien moi, je ne les abandonnerai jamais, vous entendez jamais. Après que cela fatigue monsieur Belgard, hé bien c'est le dernier de mes soucis.
Monsieur Salinovitch, vous nous parlez de ces classes, en me prenant à parti. Mais excusez-moi, êtes-vous vous même membre de ces classes ?
Ah non pas du tout et ceci depuis des années. Mais je vais devoir m'excuser d'avoir grimpé l'échelle sociale ? Si je l'ai grimpé, c'est parce que l’instruction m'a permis ceci, et moi je me bats pour que nous soyons de plus en plus nombreux dans ce cas. Lorsque je grimpais les marches, je voyais mes collègues rester en bas, alors qu'ils avaient les capacités, mais n'étaient pas bien nés, alors qu'en haut, nous les enfants du Peuple, nous n'étions que peu nombreux, les places étant pris par ceux qui s'étaient juste donné la peine de naître. Hé bien, voilà pourquoi je combats pour ces classes monsieur Belgard.
Je vais vous donner un exemple : lorsque je milite pour une hausse des impôts, que croyez-vous ? Que je n'en paie pas ? Je ferai partis de ceux qui en payeront plus. Hé oui, tous les politiques ne travaillent pas que pour leur compte en banque, cela vous en bouche un coin !
Non, non rassurez-vous monsieur Salinovitch. D'ailleurs, en parlant de vos idéaux, voilà des années qu'on ne vous a pas vu au gouvernement, pourquoi cette absence ?
Lorsque j'ai quitté Belley, mon gouvernement n'avait pu mener tous mes projets, puisque certains de mes alliés m'avaient savonné la planche. J'ai compris que je dérangeais, que je ne réussirai pas sauf si mon parti devenait seul majoritaire, voilà la seule condition qui m'aurait conduit à rejoindre un gouvernement.
Donc un constat d'échec monsieur Salinovitch ?
Mais encore heureux. Je n'ai pas encore un goitre d'autosatisfaction qui pend. J'ai une vision pour la Frôce et tant qu'elle ne sera pas atteinte, je serai insatisfait. Et je le serai à vie, car je ne me satisferai jamais de la situation des plus faibles, même si il n'y a pas que des échecs.
Les ouvriers, employés frôceux vivent mieux aujourd'hui en Frôce qu'il y a des années, et sans me mettre en avant, je suis fier d'avoir participé à ceci.
Monsieur Salinovitch, vous parliez d'alliés qui vous avez savonné la planche, de qui parlez-vous ?
Décidément c'est une lubie chez vous, il vous faut des noms. Le passé et le passé, et du passé faisons table rase !
Parlez-nous de monsieur McGregor....
Que voulez-vous donc que je vous dise ?
Hé bien, revenez sur vos relations !
Tout a déjà été dit. Nous ne sommes pas les meilleurs amis du monde, ça c'est pas un scoop. Mais j'ai du respect politique pour cet homme malgré toutes nos divergences. Heureux ?
Je n'ai pas à l'être, mais bon, monsieur Salinovitch, quand on vous voit au NPS avec les ex-PSD que vous avez combattu, vous comprenez que l'on puisse rester dubitatif ?
Bien sûr, mais j'ai un scoop pour vous monsieur Belgard. J'ai arrêté la vie politique. Aussi, nos combats passés sont du passé. Les batailles à venir sont bien plus importantes, et il faut une nouvelle génération pour les mener.
Quand vous nous parlez d'une nouvelle génération, que pensez-vous d'ailleurs de l'arrière garde qui s'accroche toujours au pouvoir ?
Chacun fait ce qu'il veut. Pour ma part, j'ai toujours défendu le fait qu'il fallait savoir se retirer pour laisser la nouvelle génération monter, celle-ci étant la plus en phase avec les évolutions de notre société, pas comme celle qui est plus proche de la tombe que du berceau. Et je me suis appliqué cet adage.
Bon puisque vous parlez de votre génération, que pense l'ancien combattant pour la démocratie de l'évolution de notre système politique ?
Si vous voulez évoquer le référendum à venir, je n'annoncerai pas de choix public m'étant retiré de la vie politique. Maintenant, ce n'est pas une surprise de dire que je voterai personnellement non étant attaché au système parlementaire. Mais vous savez, ce qui m'inquiète est l'évolution qu'on a connu : une abstention de plus en plus importante, une extrème-droite implantée qui aujourd'hui est seulement absente car son leader est décédé. Il faut que la nouvelle génération prenne ces problèmes par les cornes, sinon c'est toute notre démocratie qui pourrait en pâtir par une crise de la représentativité.
Il faudrait aussi sûrement éduquer les jeunes générations, leur rappeler par où est passé notre pays, il n'y a pas si longtemps. Nos jeunes ne sont pas conscients de ceci, mais comment pourraient-ils l'être, ceci est peu étudié à l'école, nos élites politiques n'évoquent jamais notre passé récent. J'ai été un des rares à le faire, mais d'un coté ma canne me le rappelle quotidiennement.
Vous voyez, l'attachement à la démocratie doit passer avant tout, nous ne pouvons retomber dans les affres du passé. Et celles et ceux qui sont persuadés que cela est impossible que nous retombions dans ces travers se trompent. La Russie en est le meilleur exemple. Après voir connu une légère ouverture sous Eltsine, même si elle n'était pas parfaite, est retombée dans le despotisme avec Poutine. Que cet exemple serve à la méditation de nos dirigeants, la bête immonde peut toujours revenir.
Monsieur Salinovitch, certains vous ont accusé dans le passé de mettre en avant votre histoire personnelle, dans la résistance, à des fins politiques, vous n'avez jamais répondu à ces attaques pourquoi ?
Écoutez, en tant d'années de luttes politiques, on ne m'a rien épargné. On a parfois été à la limite de la caricature du rouge avec le couteau entre les dents. Toutes les insultes ont été permises, les vexations. Je n'ai jamais répondu, car moi mon objectif n'est pas ceci. On m'a exclu de l'Assemblée Nationale, on m'a lâché en pleine mandature, et j'en passe. Mais, je vous le répète, ceci n'est pas important. L'important se sont mes combats pour la justice sociale, pour une école de qualité, pour une méritocratie républicaine.
Donc oui, je n'ai pas répondu non plus à ces attaques, même si en toute transparence, elles ont été celles qui m'ont le plus blessé. Je n'ai jamais évoqué ce passé à des fins politiques, autre que rappeler les dangers de la dictature, ce qu'elle a été. J'ai vu des camarades mourir, j'ai subi ce que j'ai subi, et utiliser ceci contre moi, oui cela m'a blessé. Mais de l'époque de la dictature, j'ai appris à souffrir en silence, tout simplement.
Monsieur Salinovitch, et cela sera ma dernière question, qu'est-ce qu’un homme aussi fougueux va-t-il faire de sa retraite ? Craignez-vous que l’inaction soit synonyme de mort ?
Oh vous savez, à mon âge, on savoure. J'espère vivre encore un peu pour faire ce que je n'ai pu faire dans ma vie : voyager, profiter de mes amis, visiter tous les coins de notre pays. Et puis tout simplement attendre la rencontre avec mon destin, et l'affronter.
Vous savez, je n'ai pas peur de la mort. Cela peut paraître très prétentieux, mais après ce que j'ai vécu dans ma jeunesse, c'est un miracle que je sois encore là. Et comme beaucoup de survivants, j'ai un sentiment de culpabilité par rapport à mes camarades de lutte qui sont morts. J'irai donc les rejoindre dans l'au-delà si cela existe ou sous terre. Ça sera l'occasion de belles retrouvailles, et de repos, que j'ai mérité. Mon seul regret est que mes engagements m'ont toujours amené à délaisser ma vie privée et oui je regrette à mon âge de n'avoir pas eu d'enfants. Mais le destin sûrement, le destin monsieur Belgard.
Merci pour cette sincérité monsieur Salinovitch et merci d'avoir répondu à mes questions.
C'est moi qui vous remercie monsieur.