Des talons claquent dans le couloir. Régulier, presque mélodieux, le bruit fait dresser les oreilles des hommes qui s'affairent à monter des meubles, dans le petit studio. La patronne arrive ! Des sourires se dessinent déjà. Tous les yeux, qui se font doux et charmeurs, se tournent vers la porte.
Zélie Cléophile Saint-Déodat fait son entrée. Elle balaye la salle du regard, puis se tourne vers ce qui semble être le patron de la petite équipe de déménageurs.
"Excellent travail. Cela prend forme. Je suis ravie..."
Elle accorde un sourire au bonhomme qui semble chavirer de bonheur. La demoiselle, sûre de son charme, s'approche de la baie vitrée. Elle pose un doigt sur la vitre, puis constate que la poussière est là disposée en épaisse couche. Un grand barbu, qui montait une armoire juste à côté, s'empresse d'attraper un chiffon pour s'approcher.
"Je vais vous passer un coup. Ce sera brillant..."
Zélie n'en attendait pas moins. Une caresse sur la joue barbue, et un très large sourire.
"Vous êtes délicieux..."
Le patron, qui ne peut décemment pas se laisser voler la vedette par un larbin, s'avance vers la demoiselle.
"Je ferai tout nettoyer par les gars. Vitres, sols, murs... Tout. Vous verrez Mademoiselle. Tout."
La jeune journaliste feint la surprise et le bonheur de se voir ainsi confrontée à de tels gentilshommes. Elle pose une main sur sa délicieuse bouche, comme émue.
"Vous n'êtes pas obligé... C'est tellement gentil... Merci messieurs. Vous faites un excellent travail."
Hop, ça c'est fait. Tout sera prêt très vite. On balance quelques sourires, puis on décolle. Au boulot messieurs, et que ça brille. Zélie abandonne ses serviteurs pour rejoindre ses bureaux. En rentrant, ce soir, son appartement sera nickel.
Christian était complètement obsédé par la jolie Zélie Saint-Déodat depuis quelques temps, cette charmante journaliste que la plus part des hommes politiques frôceux détestaient, mais ce n’était pas son cas.
Cherchant depuis quelques jours le moyen de se retrouver seul avec elle, il finit par trouver une solution.
Assis à son bureau devant un tas de dossiers qu’il n’avait pu encore étudier, il appela son assistante qui allait l’aider à appliquer son plan.
- Avec tout le respect que je vous dois monsieur, pourquoi ne pas demander à un autre journaliste, celle-ci est connu pour être impitoyable…
Christian ne l’écoutait déjà plus, et prit un document qu’il commença à parcourir tout en faisait un geste de la main en direction de son assistante pour lui signifier qu’il n’avait plus besoin d’elle.
Quelques instants plus tard, un numéro fut composé et un message fut laissé par l’assistante du Premier Ministre à la célèbre journaliste de l’AFP (Un numéro personnel n'était pas difficile à trouver pour le Premier Ministre).
"Bonjour Mademoiselle Saint-Déodat, Marine Govais, Assistante de Monsieur Le Premier Ministre. Ce dernier voudrait donner une interview exclusive sur sa première semaine à la tête du Gouvernement, et souhaiterait que vous soyez la journaliste qui aura l’honneur de le faire.
Monsieur le Premier Ministre vous fait savoir qu’il sera très déçu en cas de refus et que pour vous faire pardonner vous seriez obligée d’accepter de diner avec lui.
Je vous souhaite une bonne journée Mademoiselle."
Portable collé à l'oreille, sacs Lanvin et Gucci au bout des bras, Zélie rentre chez elle après une dure journée de travail. Son interlocuteur ne semble pas être du coin : Zélie est obligée de montrer que son accent est, dans la langue de Shakespeare, absolument exquis.
(en anglais)"Écoutes David, pour l'instant, je ne peux pas quitter Aspen... Non... Quoi? Arrête... Et ta femme? Elle est toujours à L.A.? Mouais..."
Elle soupire. Que ce footballeur est lourd...
(en anglais) "Bon... David, tais-toi deux secondes. On en reparle, parce que là, tu commences à me faire mal à la tête... Je te rappelle... Non, je te rappelle, moi. Bisous..."
Elle jette son blacberry et ses sacs sur le canapé. Un verre de San Pellegrino puis une pression sur le bouton du répondeur. Plusieurs messages. Les premiers, insipides. Puis la voix de Marine Govais. Un sourire se dessine sur les lèvres de Zélie. Rappel.
"Madame Govais? Ici Zélie Saint-Déodat... Je viens d'avoir votre message. J'ai été très touchée par la requête. Malheureusement, je suis, en ce moment sur d'autres dossiers. Je suis donc, vous le comprendrez, dans l'obligation de refuser l'interview..."
Zélie, qui ne quitte pas son sourire, laisse flotter un silence.
"Donc, dites à Monsieur Valmont que je me libère pour demain soir. Je lui fais confiance pour le choix du restaurant. J'ai une robe Gucci à essayer, elle sera parfaite dans un 3 étoiles.... Bonne soirée Madame."
Christian avait bien pris soin de libérer sa soirée.
Sur son trente-et-un, rasé, costume-cravate tiré à quatre épingles, un peu d’eau de Cologne, il monta dans la voiture en demandant au chauffeur de faire un détour pour s'arrêter chez le fleuriste.
Quelques minutes plus tard, la voiture s’immobilisa, le chauffeur lui fit signe qu’ils étaient arrivés. En quelques secondes, Christian sortit, se dirigeant vers l’appartement de Zélie.
Et sans trop attendre, il frappa à la porte se demandant si elle était prête ou pas encore.
Zélie est une femme, une vraie. Elle entrouvre la porte, sourcils froncés, et cheveux encore humides. En s'appercevant que c'est bien son chevalier servant, elle esquisse un sourire. La porte s'ouvre totalement. La jeune femme est dans un peignoir blanc sur lequel est inscrit Hilton London.
"Entrez. Je ne vous attendez pas si tôt... Prenez un fauteuil, et servez-vous ce qu'il vous plaira. Dans la commode pour les alcools et verres... Je vais être rapide..."
La demoiselle part en trottinant vers la salle de bain. Accueillir le premier ministre à moitié à poil, c'est quand même la classe...
Rapide... Cela veut dire environ 35 minutes. Christian aura eu le temps d'admirer le soin de la décoration. Il aura également eu le temps de s'ennuyer. Mais pas pour rien. Zélie surgit en tailleur blanc immaculé. Le décolleté est vertigineux. Le maquillage et la coiffure parfaits. Sobriété et élégance.
Elle attrape un sac Chanel, ses clefs puis tout sourire se poste devant la porte.
"Alors, Monsieur le Premier Ministre, vous n'êtes pas prêt? Allez, allez, en route... Où m'amenez-vous donc?"
Etrangement quand la porte s’ouvrit, Christian ne fut pas du tout surpris de voir que Zélie n'était pas encore prête.
N’ayant même pas eu le temps de lui offrir le bouquet qu’il avait amené pour elle, le Premier Ministre regarda la jeune femme quitter la pièce et s’enfermer.
Bon, attendons alors ! Faisant comme chez lui, il chercha et trouva un vase, un peu d’eau et voilà, il entreposa les fleurs au milieu de la table.
Puis se servant un verre, il s’installa sur le fauteuil, en contemplant le décor il se dit que Zélie avait de bons gouts, il sourit en voyant le trophée qu’elle avait gagné au tournoi de l’Arasa.
Le temps passait et la belle Zélie n’apparaissait toujours pas, 35 minutes plus tard, la porte s’ouvrit enfin et elle sortit.
L’attente en valait la peine, et Christian ne chercha même pas à cacher un petit sourire de satisfaction, se levant du fauteuil, il laissa ses yeux parcourir la jeune femme qui se tenait en face de lui de bas en haut, avec un tailleur blanc qui semblait cousu spécialement pour elle, des cheveux relevés en un chignon et pas très maquillée, mais Christian pensa, qu’elle n’en avait pas besoin, tout ceci faisait émaner d’elle une élégance désinvolte, quasi irrésistible.
Soyez patiente, vous le saurez bien assez tôt.
Tendant le bras pour l’inviter le suivre, ils montèrent en voiture quelques secondes plus tard.
Le chauffeur démarra après que Christian lui fit signe qu’ils pouvaient partir puis reportant son attention sur sa campagne qu’il dévorait du regard.
Vous ne m’avez même pas laissé le temps de vous dire à quel point vous êtes ravissante …Zélie ? Après une légère hésitation il rajouta,Puis-je vous appeler ainsi ?
Zélie prend place dans le rutilant véhicule de fonction. Enchantée de voyager aux frais du contribuable, elle ne se départie pas d'un large sourire. Elle pose sa pochette Dior en cuir verni noir sur les genoux, puis plonge le regard dans celui de son chevalier servant, qui y va de son compliment.
"Il n'était nul besoin de me le dire, Christian. Je l'avais déjà lu dans vos yeux."
La croqueuse d'homme gratifie le premier ministre d'un petit clin d'œil. Elle ne juge par ailleurs pas nécessaire de répondre à la question sur son appellation. Le fait d'appeler le premier ministre par son prénom devrait lui faire comprendre qu'il est tout à fait en droit de faire de même avec la demoiselle.
Elle détourne son regard afin de le poser sur le paysage urbain qui défile derrière les vitres, visiblement intriguée par la destination du véhicule.
"J'adore les surprises Christian... D'ailleurs, ce dîner en est véritablement une. Si l'on m'avait dit, il n'y a de cela que quelques jours, que le Premier Ministre m'emmènerait partager un repas en tête à tête, je ne l'aurais guère cru. Une belle surprise..."
Le regard noisette de Zélie revient vers Valmont. Si elle devine sur le visage de ce dernier, une certaine attirance pour elle, la journaliste ne peut s'empêcher d'être troublée. Valmont... Ce nom résonne comme celui d'un cynique libertin qui garnit son tableau de chasse par simple défi. Cette pensée fait danser une flamme d'intérêt dans les yeux de Zélie.
"Qui êtes-vous vraiment, Christian? Pourquoi cette invitation? Où tout cela est-il sensé nous mener?"
On ne se refait pas... Zélie a toujours eu le don de poser des questions embarrassantes.
La journaliste s’assit sur le siège arrière de la voiture ce qui fit remonter légèrement sa jupe, et l’on put voir une étincelle dans le regard du Premier ministre à la vue de ce petit morceau de chair dévoilé que le petit sac en cuir ne couvrait qu’à moitié.
Et alors que les lumières de la ville défilaient sous leurs yeux par les vitres de la voiture, Zélie commença à le questionner.
Déformation professionnelle.
Depuis le début Christian ne détourna à aucun moment son regard de sa campagne, et après quelques secondes il commença.
Qui suis-je vraiment ? Excellente question, mais me croirez vous seulement si je vous répondais ?
Il marqua une pause avant de dire.
Je suis un homme qui aime profiter des plaisirs de la vie, sans aucune exception. ajouta-t-il en la regardant.mais qui aime cultiver une part de mystère.
Voilà pourquoi si vous souhaitez découvrir qui je suis réellement, il vous faudra bien plus qu’une simple question.
Quant à la raison de l’invitation, je pensais que c’était pour vous faire pardonner de ne pas avoir pu m’interviewer.
Dit-il avec un petit sourire triomphant.
Il me reste une dernière réponse si je ne m’abuse…
Ou tout cela est-il sensé nous mener !
Il prit tout son temps avant de répondre.
Bien que faire de la politique implique que l’on doive penser à l’avenir, j’aime vivre au jour le jour, donc si vous voulez une repense précise à votre dernière question, vous risquez d’être déçue.
Pour l’instant, je passe un excellent moment avec une charmante femme et j’aime à penser que la soirée ne fait que commencer et que le meilleur reste à venir.
Pensez-vous pouvoir écrire un bon article avec ces réponses ?
La voiture s'arrêta, signe qu'ils étaient arrivés à destination.
En plein centre ville, l’un des hôtels les plus luxueux d’Aspen, un hôtel 5 étoiles ou il avait tout à sa disposition quand il le souhaitait, ayant été l’avocat du propriétaire et pour lui avoir sauvé la mise plusieurs fois, ce dernier ne ratait aucune occasion pour l’en remercier, bien que les honoraires de l’avocat à l’époque aient été très élevés.
Au tout dernier étage, se trouvait le restaurant qui offrait une vue spectaculaire sur toute la ville, et dés leur arrivée, un homme d’âge mur vêtu d’un smoking noir contourna le bureau et s’avança vers eux.
Monsieur Valmont, Madame, votre table vous attend, si vous voulez bien me suivre…
Pas de Premier Ministre ici, il était connu en tant que Monsieur Valmont, et il tenait à ce que cela continue.
Ils traversèrent la salle décorée prestigieusement, d’un charme vieillot teintait d’une touche de moderne, des baies vitrées partout, mais une ambiance intime, raffinée et de bon gout, tout ceci sur une musique de fond très douce.
Arrivés à leur table, l’homme écarta la chaise pour la charmante demoiselle, puis une fois les deux jeunes gens installés, reprit d’un sourire :
J’espère que vous passerez une agréable soirée.
Nous en avons bien l’intention…
répondit Christian puis se retournant vers Zélie il ajouta.
En entendant Christian affirmer qu'il faudrait plus d'une question pour le percer à jour, Zélie dévoile sa blanche dentition en un large sourire. Voilà justement ce qu'elle compte faire : mettre à profit ses longues années de journalisme pour faire tomber les masques.
C'est ensuite un rire franc et joyeux dont sera gratifié Christian Valmont en demandant si la demoiselle trouvait là matière à rédiger un article.
"Je serai capable d'écrire un bon article en partant de rien. Alors, vous pensez bien qu'avec ceci, j'ai de quoi viser le Pulitzer... Mais je n'en ferai rien. Vos confidences, vos secrets et vos éventuelles perversions, resteront entre nous..."
C'est sur ces mots que Zélie quitte le véhicule, le regard malicieux, pour se laisser guider vers la table. Décidément, Valmont a mis le paquet. Il semble vouloir étonner sa cavalière. Mais cette dernière est difficilement impressionnable. Elle a vu du pays. Elle en a visité des palaces et des restaurants classés au Michelin ou au Gault & Millau. Elle a d'ailleurs déjà mangé une paire de fois dans le restaurant de ce luxueux hôtel. Mais pour ne pas froisser son Ministre de compagnon, elle jouera ce soir l'émerveillement.
"Somptueuse salle. Si la nourriture est au diapason, alors je serai contrainte de vous accorder que l'attente n'était pas vaine."
Elle conclut la chose par un sourire dont elle a le secret. Celui qui laisse apparaitre ses délicates et délicieuses fossettes. Celui qui ferait fondre le plus dur des hommes. Mais fidèle à elle-même, une question ne tarde pas à être décochée.
"Vous semblez être un habitué, vous amenez souvent des femmes à cette table? Cela doit les impressionner... Je sens en vous un séducteur hors pair, sûr de ses effets de manche et de son charme... Je me trompe?"
C'est, évidemment, accompagné d'un sourire qu'elle confie ici ses impressions.