[Salle de Réunion] le service civique obligatoire

[Laurent de Montredon]

Au fond d'un couloir, une porte avec une pancarte dessus : "salle de réunion".
Un homme, tout de noir vêtu, attend devant la porte. Il a été chargé d'accueillir les différents protagonistes de la discussion.

[Laurent de Montredon]

Le ministre de l'intérieur a pris place dans la salle de réunion, entouré de son équipe ministérielle. Il n'attend plus que ses interlocuteurs.

[Asuka Finacci]

Les syndicats de lycéens ont décidé dans un but d’efficacité de laisser une seule représentante s'exprimer en leur nom, Urumi Asato, âgée de 16 ans, fait partie des nombreuses personnes d'origine japonaise vivant à proximité du pont reliant l'Ile de l'Agrume à la Province des Prigors, elle semble plutôt détendue et ouverte au dialogue.

[Asuka Finacci]

Les proviseurs ont opté pour la même tactique que les lycéens en déléguant le seul Jonathan López, 49 ans, proviseur d'un lycée d'Uzarie. Il semble également plutôt ouvert au dialogue et peu stressé.

[Laurent de Montredon]

A l'entrée de ses deux interlocuteurs, Laurent de Montredon se lève. Il salue Urumi Asato puis Jonathan Lopez. Il les invite à s'assoir.
Laurent de Montredon affiche un sourire que certains interprèteront comme crispé et d'autres comme franc.

Mademoiselle Asato,
Monsieur Lopez,
Je suis ravi que cette réunion ait pu s'organiser avec autant de rapidité. Je tenais à ce qu'une telle discussion ait lieu très vite afin de dissiper les malentendus, d'échanger sur les éventuelles améliorations et de discuter sur de possibles ajouts.
Si vous le permettez, voici comment va se dérouler la réunion.

Vous connaissez la teneur du projet du service civique, je ne m'étendrai donc pas dans un long monologue.
Par contre, je souhaite vous entendre. Le mouvement ayant été initié par les lycéens, je laisse le soin à Mademoiselle Asato de se présenter, dans un premier temps,
puis de me faire part des doléances de ceux qu'elle représente.
Ensuite, Monsieur Lopez, vous pourrez prendre la parole et développer votre argumentaire.

Bien sûr, je ne veux pas que notre réunion soit une suite de monologues. Si l'un d'entre nous juge opportun d'intervenir pour initier le débat, il en a tout à fait la possibilité.

Maintenant que les règles ont été présentées, je vous écoute Mademoiselle Asato.

[Asuka Finacci]

Suite à l'intervention du ministre, Urumi Asato s'exprime en ces termes

Monsieur le ministre,
Monsieur le proviseur,

J'ai été mandatée par l'intersyndicale pour vous faire part des inquiétudes qui traversent actuellement un nombre croissant de jeunes frôceux, près des trois quarts des lycées ont été perturbés aujourd'hui et il y a fort à penser que la mobilisation continuera à s'intensifier durant le vote par l'Assemblée Nationale.

La mobilisation ne cessera pas avant la fin du vote de l'Assemblée Nationale, la cesser auparavant serait un signe de faiblesse de notre part, et aucun dirigeant syndical ne pourrait justifier une telle chose devant ses adhérents.

Si le texte venait à être voté par les députés, nous tenons à faire savoir que nous continuerons le combat jusqu'à ce qu'une solution soit trouvée pour que les personnes effectuant leur service civique soient payées dignement, il est hors de question que nos petites sœurs et nos petits frères servent de cobayes pour le rétablissement de l’esclavage.

[Asuka Finacci]

Jonathan López s'exprime à son tour

Mademoiselle Asato,
Monsieur le ministre,

Le service civique n'impliquant pas directement les proviseurs, nous n'avons pas trouvé bon de faire part d'une opinion officielle.

Notre seule préoccupation est que les lycées ne soient pas bloqués dans le cas où la mobilisation des lycéens se poursuivrait.

[Laurent de Montredon]

Mademoiselle Asato,

Je prends acte de votre présentation de la situation et je la partage.
Cependant, la réunion d'aujourd'hui a pour but de trouver des solutions pour que cette loi n'attise plus la colère lycéenne. Rien n'empêche que la loi soit acceptée puis que nous la modifions par la suite. J'ai procédé de la sorte avec la loi sur la sécurité intérieure et le temps que la première version soit appliquée, nous aurons largement le temps de la modifier.

Je comprends également que le mouvement ne puisse pas s'interrompre aussitôt sans signe du gouvernement. L'intérêt est de trouver le compromis à court terme qui permettra de calmer le mouvement et de poursuivre les discussions pour qu'à long terme le message lycéen passe.
Je suis à ce sujet tout à votre écoute.

Quant au troisième volet de votre intervention, le but est, même si la loi est adoptée, que votre message passe. Je vous le dis honnêtement. Le projet de loi, qu'il devienne loi, ou qu'il soit rejeté par les représentants parlementaires, sera modifié pour tenter au mieux de correspondre à vos revendications. Je ne dis pas que je pourrais tout mettre en oeuvre mais je promets de prendre en compte au moins une partie de vos propositions.
Je vois que l'une de ces revendications concerne la rémunération.

Je conçois que l'on souhaite être rémunéré pour un travail, sauf que le projet de loi sur le service civique ne prévoit pas de mettre au travail les jeunes.
Il s'agit, à l'instar des stages et de l'ancien service militaire, de formations, de missions ... Nous ne sommes pas là dans le cadre d'un emploi qui mériterait salaire.
L'idée même du service civique est de donner sa chance à notre jeunesse en lui permettant d'accéder à des milieux associatifs, humanitaires, administratifs ...
Je ne suis pas votre ennemi, je ne suis pas là pour mettre votre force et vos bras au service du privé, au service des patrons. Je suis là pour vous permettre de vous intégrer à la société civile en instaurant une marche de transition entre la vie scolaire et la vie active.


Quant à vous Monsieur Lopez,
je pense que le chemin que prennent les choses vont dans le sens de votre souhait.

[Asuka Finacci]

Monsieur le ministre,

Vous comprendrez aisément que nous préférons attendre l'issue du vote du parlement avant de décider d'assouplir le mouvement, mais en ce qui concerne la suite, nous sommes ouverts au dialogue, il serait triste que nous passions notre réveillon de Noël à manifester.

Nous sommes également conscients que ce service n'est pas l'équivalent d'une activité salariée ordinaire, mais dans la mesure où il est obligatoire, la forme de bénévolat nous parait en décalage vis à vis des standards modernes. L'intersyndicale que je représente a proposé un montant équivalent à 50 % du SHG, et je crains que nous ne pouvions pas négocier ce chiffre à la baisse, certains syndicats ne partagent pas les idées modérées que je privilégie.

Monsieur le proviseur,

A titre personnel, je pense que les blocus du premier jour ont été une erreur, et les syndicats modérés partagent cette vision. Mais je ne peux que vous avertir que les syndicats les plus durs pourraient revenir à ces méthodes si les négociations se montrent infructueuses.

[Asuka Finacci]

Mademoiselle Asato,

Je me suis heureux de la volonté des syndicats modérés de ne pas aggraver la situation, mais je ne peux que rappeler que les bloqueurs s'exposeront à des sanctions disciplinaires.

Monsieur le ministre,

L'appel aux forces de l'ordre du premier jour a été maladroit et nous pensons que c'est le travail du Gouvernement de décider seul des suites non disciplinaires éventuelles.