Chacun a foi en ses propres observations, personnellement je préfère me baser sur le ressenti des personnes à qui j'ai l'occasion de parler et de moi-même quand il ne s'agit pas d'établir une statistique fiable et il ne me semble pas qu'il soit possible d'établir une statistique fiable sur la connerie.
Tu comprends bien que dès lors ton observation souffre d'une fragilité. Quand tu expliques tout ton raisonnement, comme tu le fais là, on comprend mieux tes intentions. Parce qu'au début, ça faisait un peu brut de décoffrage et "c'est comme ça pas autrement".
Après il est tout à fait possible que je croise plus de personnes que je considère comme connes en tant que paysagiste qui se retrouve sur la paille que tu n'en croises en tant qu'étudiant en IEP.
Tu sais, j'habite dans un village reculé. Alors les beaufs' je les connaît aussi très bien. D'autant qu'un IEP n'est pas formé que de personnes forcément géniales et brillantes
Nous sommes dans un débat pas dans un colloque scientifique, donc chacun énonce les observations en lesquelles il a foi tant qu'il ne les érige pas en vérité absolue, ai-je dit une seule fois que ce chiffre était vérifié ou incontestable ?
Le problème c'est qu'il y a deux types de débat.
Dans le premier on échange des grandes idées : "je pense que l'homme est naturellement bon/mauvais", "je pense que la Société a un impact premier sur les actions individuelles (ou pas)", "je défends/conteste le droit à l'identité car je défends le particularisme/l'universalisme". Là on retombera sur la phrase issue du film
Thank you for smoking : "tant que tu peux argumenter, tu as raison".
Maintenant quand on commence à dire "les gitans ne travaillent pas", "90% des gens sont cons", "les français ne travaillent pas assez", "l'immigration pose un problème sécuritaire" on doit s'appuyer sur des données. Bien sûres, celles-si ne sont jamais parfaites. Bien sûr, comme tous les chiffres ils sont manipulables à notre guise. Mais au moins on s'approche de quelque chose de plus réel. Je vais vous faire la confidence, HRP, quand on me lance ce genre de vérités sans que je n'ai connaissance de chiffres, je refuse catégoriquement de "débattre" puisque sur une question impliquant un vrai et un faux je n'ai rien d'autre à proposer qu'un ressenti (qui peut être totalement à côté de la plaque).
Ce ressenti, il faut s'en méfier. Je vous renvoie aux travaux de Paul Lazarsfeld qui, en introduction d'une étude sociologique d'une compagnie militaire, balance des vérités ("les sudistes résistent mieux à la chaleur viet-namienne que les nordistes", "les noirs ne recherchent pas de promotion" etc…) et leur donne des justifications de "bon-sens" ("bah oui, les sudistes sont habitués à un climat plus chaud", "évidemment, la fainéantise des noirs est proverbiale"). Une fois qu'il a fait ça, il annonce à son lecteur que tout ce qu'il avait énoncé avant été strictement faux. Il montrait donc l'utilité de la sociologie et des études pour dépasser ce qu'il nomma "les prénotions".
Qui peut juger de façon officielle qui est con ou pas au final ?
Des tests civiques ou le QI (comme proposé par les raéliens) pourraient faire l'affaire.
Et je pense sincèrement que même s'il y a des efforts à faire en matière d'éducation et d'information, la nature humaine est mauvaise, si elle n'était pas mauvaise pourquoi certains privilégient les profits financiers sur les vies humaines alors que je crois qu'ils sont bien loin du niveau du brevet des collèges ? Pourquoi se préoccuper d'une pulsion bestiale au risque de dévaster les sentiments d'une autre personne ?
La nature humaine étant mauvaise, elle pousse beaucoup à choisir le chemin du simplisme, qu'on peut appeler connerie en politique.
Ah la fameuse nature humaine. De mon côté je me retrouve dans l'analyse que développe Jacques Généreux dans
La dissociété. À mon sens, la nature de l'homme est d'être un "être social". L'homme se construit et ne devient lui-même qu'en Société. C'es également une théorie avancée par Norbert Elias qui rappelle que c'est le contact de autres et le processus de socialisation qui permet à un humain d'exister réellement. Dès lors, responsabiliser l'individu pour ce qu'il est "naturellement" est erroné. L'être humain est le produit d'une interactivité entre lui et les autres. C'est pour cela que Généreux en arrive à dire qu'avancer que l'être humain est naturellement bon ou mauvais est une erreur qui confère beaucoup trop de poids à l'individu en lui-même. De son côté, Marx pense que les états de nature des contrats sociaux sont des "robinsoneries".
Et désolé de te brusquer pour Bourdieu, je ne nie pas ses talents mais ça fait souvent trop répétitif venant de toi.
J'en suis désolé. D'autant que j'ai pas l'impression de le faire ressortir à chaque fois. Mais bon, c'est un auteur complet qui a touché à beaucoup de choses dans sa carrière. Il y a beaucoup de sujets où il revient et où tu peux l'utiliser.