[1, rue de la Paix] - Le Menn/Lacroix (Rés principale)

[Hélène Le Menn]

Hélène avait l'impression de "rester sur sa faim". Mais elle acquiesça silencieusement et continua la conversation pour rassurer son homme malgré tout.

Tu sais quoi ? On doit attendre le procès éventuel... Mais, je suis sûr que tu seras pas responsable. Car, tu le sais bien, on ne choisit pas sa famille. Et puis sous la contrainte, la torture, tu étais obligé de commettre des atrocités indirectement, et tu le savais pas. Par contre va te falloir un sacré bon avocat en plus ! Car, je préfère être franche et directe, les familles vont vouloir que tu casques tout simplement parce que tu es le petit-fils de l'ancien Dictateur...

[Louis-Damien Lacroix de Beaufoy]

- C'est exactement ce que je crains... que les gens fassent l'amalgame entre lui et moi. J'ai rien à voir avec la dictature, et j'espère que ça aura apaisé les esprits de voir ce que j'ai fait durant ma présidence. Ils ouvrent sans le savoir un véritable pugilat. Je ne veux pas que toi et les enfants soyez exposés à tout ça. Et en même temps, j'ai gardé des documents et des éléments de côté, en vue du jour où ça arriverait... je n'irais pas au procès sans élément et si jamais dans le pire des cas je venais à tomber, je ne tomberais pas seul.

Il marqua une courte pause avant d'ajouter :

- Je pense que Christian sera un bon avocat, il me connait, nous sommes amis depuis longtemps et il saura me défendre. Tu n'as plus de contact avec Hamilton ?

[Hélène Le Menn]

Hélène "accentua" son étreinte de façon plus sensuelle afin de montrer un véritable soutien. Et elle répondit avec énormément de calme, ce qui pouvait paraître surprenant vu la situation.

Je te soutiendrais quoiqu'il arrive, je serais toujours là pour toi, tu le sais je m'en doute. Rien n'entravera mon amour envers toi.

La jeune femme marqua également une pause car elle était étonnée que Louis-Damien lui demande si elle avait encore des contacts avec Hamilton, cet enfoiré de détective sans scrupule et fasciste en prime.

Pourquoi tu me demandes si j'ai encore des contacts avec cette enflure ?

[Louis-Damien Lacroix de Beaufoy]

- Parce qu'il te donnait des informations sur moi à une époque et je ne dois rien laisser au hasard... tu sais que je n'aime pas les mauvaises surprises.

Il rendit l'étreinte à Hélène et oubliant qu'il était sensé lui faire la gueule, il l'embrassa tendrement.

- Tu as réfléchi à ce dont on a parlé hier ?

[Hélène Le Menn]

Appréciant plus que tout au monde d'avoir un câlin de Louis-Damien, avec bien évidemment les câlins avec ses bambins, Hélène ferma les yeux et répondit calmement :

Oui je suis d'accord pour qu'on passe le mercredi et le jeudi tous les 4 sur Aspen. Et puis j'ai compris que ça te convenait parfaitement, non ? Vraiment désolé pour hier soir, mais ça veut pas dire que je t'aime pas ! Bien au contraire, j'ai jamais été aussi heureuse qu'avec toi, depuis tu sais quand...

[Louis-Damien Lacroix de Beaufoy]

- Oui... je sais...

Louis-Damien n'aimait pas repenser au passé, cela l'avait suffisamment hanté pour qu'il veuille l'oublier et aller de l'avant. Leur couple était quand même une belle histoire. Ils s'aimaient malgré la façon dont ils avaient fait connaissance, lui en tant que membre de la Veilleuse, elle, en tant que fille d'un révolutionnaire, qui avait été fusillé sous ses yeux. Lacroix savait que bientôt les vieux dossiers allaient être dévoilés. Il serra Hélène contre lui et respira doucement l'odeur de ses cheveux. A cet instant, elle était ce qui comptait le plus pour lui, avec les jumeaux. Au cas où cette histoire tournerait mal, il allait prévoir un billet d'avion pour partir dans un autre pays, en Israël. Il était juif et il savait que ses comparses n'allaient pas l'extrader, leur relation avec la Frôce s'étant largement refroidi après la reconnaissance par Fevernov de la Palestine.

- Je t'aime, Hélène, tu sais que je ne peux que te pardonner. C'est dur pour toi, je le sais... mais je ne veux pas que tu gardes ça pour toi. Je suis là pour ça, aussi... pour t'écouter.

Il caressa doucement son épaule. L'envie de la veille, de concevoir un autre enfant lui vint, mais il se dit que ça n'était pas raisonnable. Après les difficultés que rencontraient Hélène, il ne devait pas lui ajouter une grossesse sur le dos. Difficile néanmoins de résister, d'autant qu'au pied du lit, il la trouvait torride.

[Hélène Le Menn]

Profitant au maximum du silence pour se calmer, Hélène le rompit au bout de 2 minutes pour enchaîner sur le sujet de la Commission d'Enquête sur la Dictature.

Chaton, tu comptes faire quoi, quelque soit le rapport de la Commission ? Rester ici ? Partir pour éviter un procès ?

Elle préféra marquer une pause, car la suite allait faire sûrement l'effet d'une bombe.

Loulou, tu sais que je t'ai toujours soutenu depuis que j'ai compris mes sentiments te concernant. Depuis que je sais que je t'aime ! Tu connais mon honnête et ma franchise également. Mais si jamais tu es jugé responsable de tes actes par cette Commission, et que tu devrais passer devant la justice, je serais vraiment déçu que tu oses fuir à l'étranger. Je prendrais même ça pour une trahison, un affront ! Car je crois vraiment, que tu n'es pas comme ton grand-père.

[Louis-Damien Lacroix de Beaufoy]

Il fronça les sourcils lorsqu'Hélène tapa dans le mille. Elle le connaissait plutôt bien, et elle savait qu'il pouvait être très lâche. Il la regarda et soupira :

- Si jamais les choses tournent mal, je ne veux pas que toi et les enfants vous en payiez le prix. Je sais ce que j'ai fait, je sais que j'ai commis des erreurs et que j'aurais pu les éviter si j'avais réfléchi. Mais je ne veux pas que ça vous fasse du mal. Toi tu sais qui je suis, tu sais que je n'ai rien à voir avec lui. Je pensais qu'en devenant président de la république, j'aurais la possibilité de prouver à la Frôce entière que je n'étais pas comme lui... mais même avec ça, je ne suis pas sûr que ça suffise. Je suis peut-être paranoïaque mais j'ai l'impression qu'ils vont s'en donner à coeur joie à mon encontre. Tu sais, on a vécu ça tous les deux, à l'époque... tes parents passaient pour de véritables terroristes inhumains et assoiffés de sang aux yeux de la population, grâce à la propagande. Il risque de m'arriver la même chose. Est-ce que tu te vois expliquer aux jumeaux que j'ai été reconnu coupable de crimes abominables et de complaisance avec la dictature ? Quel sera leur avenir en Frôce si jamais je fais de la prison à perpétuité et quel sera le tien ? Quand vous sortirez dans la rue, on parlera de vous comme la famille d'un... fasciste ? Je me refuse de l'envisager, ou de le vivre... alors oui, Hélène, j'ai prévu une porte de sortie. Tu appelles ça de la trahison, mais je ne trahis personne. Je veux protéger ma famille et je refuse de me voir accuser d'ignominie que je n'ai pas commise de mon grè sous prétexte que je suis le petit-fils d'un Dictateur. Je n'ai pas confiance en cette commission. Chaque fois qu'il y a eu une "râfle" dans l'histoire, ça c'est mal terminé et tu le sais.

Il se détacha d'elle et ajouta, avec une certaine froideur. Il était vexé par quelque chose et il demanda donc, sans la quitter des yeux :

- J'ai tourné la page de mon passé, je ne veux pas en réouvrir le livre. Si la commission me jugeait responsable, tu soutiendrais sa décision ? Tu accepterais que je sois condamné ? Je te remercie pour ton... hum... soutien... il me fait plaisir...

Hélène avait touché un point sensible. Pour Louis-Damien son soutien était capital et il voyait celui-ci s'évanouir dans sa déclaration...

[Hélène Le Menn]

"Sans prévenir", Hélène se mit à fondre en larmes... Tout en se réfugiant dans sa chambre.

[Louis-Damien Lacroix de Beaufoy]

Louis-Damien s'était attendu à des cris et à une nouvelle dispute. En lieu et place, il obtint des pleurs. Hélène partit dans sa chambre. Il se dit qu'elle avait un vrai comportement de gamin depuis hier... Mais bon, en même temps, il n'y était pas pour rien. Comme la veille, il se dirigea vers la porte et sans l'ouvrir, il parla :

- Tu ne vas pas me faire culpabiliser... Je sais ce que je ne veux pas qu'il arrive, à toi et aux gosses. Donne-moi une bonne raison, une raison rationnelle, de ne pas prévoir cette porte de sortie. Donne-moi une raison valable et j'oublie définitivement cette idée. J'ai tout fait pour être quelqu'un d'exemplaire, j'ai donné tout ce que je pouvais pour essayer de changer mon image, ça ne sera pas suffisant. Si je n'avais pas été là, et ça tu le sais, tu ne serais pas là pour en parler, tu aurais toi aussi, avec ta soeur, été fusillée. J'ai suivi les ordres que l'on me donnait... je n'avais pas le choix, je ne me posais pas les questions, je préférais m'évader en écrivant sur des bouts de papiers ou en regardant les rallyes à la télé. Mais le jour où je t'ai rencontré, tout a changé pour moi. Cette fois là, j'ai désobéi à mes ordres. Tu étais tellement pure, tellement belle que tu m'as donné la force de changer, de devenir une autre personne. Je n'ai pas oublié ce regard terrible que tu m'as lancé, ce regard de haine. Jamais de ma vie, je n'ai autant honte de moi-même, jamais je ne me suis senti autant coupable. Je t'ai aimé la première fois que je t'ai vue, que je t'ai dit à voix basse de te réfugier au fond de l'habitation et de ne plus bouger. Tu crois que je serais prêt à te voir souffrir pour mon passé ? Jamais, quitte pour ça à partir du pays, ensemble, toi, les jumeaux et moi. Mais je ne peux rien faire si toi-même tu ne me soutiens pas. Je croyais que je t'avais montré ce que j'étais vraiment, que tu m'aimais malgré ce que j'avais fait. Je pensais avoir gagné ton coeur, ta confiance... ton soutien. Mais si même toi, tu n'es pas prête à me soutenir dans cette épreuve, cela veut dire que j'ai échoué. J'en prends note... je suis désolé, Hélène.

Louis-Damien baissa la tête et passa une main sur son visage pour masquer les larmes qui commençaient à naître. Il ne pleurerait pas, son grand-père l'en avait toujours défendu et bien qu'il soit mort, sa menace pesait encore sur lui, plus que jamais. Il tourna les talons, enleva son alliance et la posa sur la table du salon. Il se dirigea ensuite dans la chambre d'ami où il y avait des affaires. Il sortit son plus beau costume et entreprit de s'habiller rapidement. Il savait ce qu'il allait faire. De toute façon, après le désaveu de sa femme, il se moquait de tout ce que cela pouvait impliquer.